Musique de chambre
Resmusica - 12 octobre 2005 - Jean-Christophe Le Toquin
"Max d'Ollone sauvé des sables"
Qui est Maximilien-Paul-Marie-Félix d’Ollone, dit Max d’Ollone, compositeur français né à Besançon en 1875 de famille aristocratique, mort en 1959 à Paris « dans son appartement de la rue de Grenelle, entouré de livres, de partitions, entre musique et poésie », selon la description qu’en fait Anne-Charlotte Rémond dans sa notice ? Pour l’auteure du livret, par ailleurs productrice à France-Musique, il est un « républicain, qui a de hautes idées sur les pouvoirs et les devoirs de la musique ». Pour l’Histoire, c’est le détenteur du Prix de Rome 1897 et le directeur de l’Opéra Comique, salle Favart, de 1941 à 1944. Résumer la vie et la carrière de Max d’Ollone au plus prestigieux prix académique et aux quatre années les plus noires de la France du XXème siècle est certainement caricatural et probablement injuste. Il est néanmoins des faits, telle l’Occupation, qu’Anne-Charlotte Rémond aurait dû affronter dans sa notice. D’autant que le travail de redécouverte effectué par Maguelone à travers sa série « French Soloists » est remarquable.
Après avoir publié mélodies et œuvres ambitieuses de musique de chambre, Maguelone publie un méli-mélo d’œuvres composées entre 1892 et 1931, requérant des combinaisons instrumentales variées, parfois inhabituelles comme l’Andante et Scherzo pour trois violoncelles, et toutes éditées en première mondiale. Il ne faut chercher ni homogénéité dans le programme ni modernité outrancière dans le langage, l’art de Max d’Ollone étant d’une poésie sans affectation et d’une clarté rafraîchissante. Signe de qualité, elles s’apprécient davantage au fur et à mesure des écoutes. On tombe sous le charme de l’onirisme troublant de la Fantaisie orientale, de la rêverie méditative du Nocturne, de la mélancolie d’une élégante pudeur de la Danse des fées, de la passion concentrée, rentrée, de l’Andante et Scherzo, ou encore de la subtilité des sonorités de la Fantaisie.
Assez naturellement, les œuvres de jeunesse, Coquetterie, Scènes Païennes, et dans une moindre mesure la Petite Suite sont plus conventionnelles, œuvres de salon fin de siècle. Ce qui fait de ce disque un objet musical significatif dans la redécouverte de Max d’Ollone, est son caractère éminemment français. Patrice d’Ollone, petit-fils du compositeur et pianiste, est l’ardent défenseur et interprète de la résurrection de l’art de son aïeul, et la sincérité de son engagement est patente dans son jeu sensible. Les musiciens réunis pour cette réhabilitation sont solistes à l’Orchestre National de France, et ces enregistrements constituent une forme de photographie de cet orchestre, du moins de ses meilleurs éléments. Si l’interprétation ne paraît pas toujours extraire le maximum de pièces comme les Romanichels ou l’Andante et Scherzo, l’ensemble est extrêmement plaisant, il ravira les amateurs de musique française comme ceux qui sont à la recherche d’atmosphères raffinées et évocatrices. Une redécouverte tardive mais heureuse.